Les reins sont des organes de petite taille avec de nombreuses fonctions physiologiques élimination des déchets d’épuration, sécrétion des hormones, régulation de la production des globules rouges… Dans les conditions normales, le travail rénal est facilité par l’apport hydrique. C’est ainsi que plus on consomme d’eau et plus les reins fournissent moins d’efforts pour l’élimination des déchets. A l’inverse, plus on réduit la consommation d’eau, plus les reins doivent davantage travailler pour éliminer le maximum de déchets dans une petite quantité d’eau. Qu’en est-il des patients qui souffrent de maladies rénales pendant le mois de Ramadan?
Durant le mois de Ramadan, du fait du jeûne que nous observons du lever au coucher du soleil, notre corps est parfois soumis à rudes épreuves à cause de la privation d’eau, qui peut entraîner une diminution de la filtration glomérulaire rénale.
Si pour une personne adulte saine, le problème peut être supporté sans gravité, il n’en est pas de même pour les patients qui souffrent de maladies rénales. Les conséquences peuvent être parfois graves, surtout pour les malades qui s’obstinent à vouloir malgré tout jeûner.
Pour mieux cerner les réels problèmes de santé ainsi que les différentes complications inhérentes aux affections rénales auxquelles peuvent-être confrontés bien des malades qui présentent des maladies rénales et qui tiennent à tout prix à faire le jeûne du mois de Ramadan, nous avons rencontré pour vous le professeur Amal Bourquia, spécialiste en néphrologie et président fondatrice de l’association REINS.
Que pouvez – nous nous dire au sujet du jeûne de Ramadan et maladies rénales?
Professeur Amal Bourquia: Pour bien comprendre si un malade est atteint d’une maladie rénale et savoir s’il peut jeuner ou pas , il faut d’abord rappeler que le rein a besoin surtout d’un apport hydrique important pour faciliter son travail.
Pendant le mois de Ramadan, il y a un changement dans l’apport quotidien d’eau. De ce fait, le rein doit fournir plus d’efforts pour concentrer l’urine, éliminer l’ensemble des déchets, car la fonction essentielle du rein est d’éliminer tout ce qui est annexé. C’est-à-dire, que tout ce qui entre doit être en équilibre avec ce qui sort pour garder un organisme en bon état de fonctionnement.
Le changement brutal qui intervient au mois de Ramadan, nécessite une adaptation dans la mesure où nos repas se déplacent vers la nuit, et donc, le maximum de travail va être fait la nuit. Il faut qu’il y est un apport suffisant d’eau, et il faut aussi que le rein soit en capacité fonctionnelle pour faire face à tous ces changements, faire face a l’insuffisance en apport d’eau. Car les gens ne boivent pas beaucoup d’eau le soir.
Donc les maladies rénales sont très variables: c’est-à-dire, qu’il y a certaines maladies légères. Dans ce cas, les malades bénéficient d’un suivi médical, prennent des médicaments. Ces patients ont une fonction rénale qui est normale. Dans ces situations de maladies stables , avec un suivi médical , ces malades doivent s’adresser à leur médecin traitant avant le mois de Ramadan pour adapter leurs régimes alimentaires, la prise des médicaments, et bien entendu avoir l’avis médical pour savoir s’ils peuvent jeûner pendant le mois de Ramadan ou pas.
Quid des malades atteints de Lithiases rénales?
Ceci étant, pour toutes les autres maladies rénales les plus fréquentes, il y a les lithiases rénales (calcul) plus communément désignés chez nous sous le terme de hjare (Cailloux). On a constaté qu’il y a un nombre plus important de malades qui souffrent de coliques nephretiques (douleurs) pendant ce mois Sacré, sans que l’on ait vraiment des explications scientifiques. Il est certain que la déshydratation pendant plusieurs heures diminue le volume des urines. Ce qui peut favoriser chez certaines personnes des lithiases rénales.
Donc ce à quoi il faudrait aussi veiller pour ces malades stables, autorisés médicalement a jeûner, c’est qu’ils doivent boire suffisamment d’eau, avoir une diurèse suffisante afin d’empêcher toutes les petites particules présentes dans les urines de se regrouper , de finir par former une lithiase.
Mais dans certains cas, on peut avoir des lithiases instables, souffrir de crises douloureuses. Le médecin peut à cet effet conseiller à son patient de ne pas jeûner pendant un où deux jours, où pendant tout le reste du mois de Ramadan. C’est au cas par cas, tout se passe en fonction de chaque malade, de chaque situation médicale, d’où l’importance de prendre conseil auprès de son médecin traitant qui est le seul habilité à vous dire ce que vous devez faire.
Que faire en cas d’infection urinaire?
Oui, mais avant cela, il y a d’autres pathologies (maladies) : se sont toutes les maladies rénales qui atteignent le glomérule qui est l’unité fonctionnelle, que ce soit l’atteinte des vaisseaux, l’atteinte du glomérule. Si ces atteintes ne sont pas à un stade avancé, le jeûne est autorisé sous surveillance. Mais si on est en présence d’une symptomatologie comme une protéinurie, une urée importante, un début d’atteinte rénale, à ce moment-là, il faut avoir un avis médical et le plus vite possible.
Alors, concernant les autres pathologies de l’appareil urinaire comme les infections urinaires, les brulures mictionnelles, ou affections de la vessie, elles empêchent le jeûne pendant quelques jours pour permettre au malade de suivre correctement son traitement, mais tout dépend de l’évolution et de la gravité de la pathologie.
Qu’en est-il des malades sous dialyse?
Pour les malades souffrant des problèmes rénaux, il y a différents stades. Si on est à un stade très précoce comme le stade 1, et si tous les autres éléments sont sous contrôle comme la tension artérielle, la nutrition, la prise des médicaments, et si la surveillance médicale montre qu’il y a une grande stabilité, à ce moment là, le médecin peut selon les circonstances autoriser le jeûne, et faire un contrôle au bout d’une semaine, et assurer un suivi rigoureux.
Pour les malades insuffisants rénaux qui sont a un stade avancé dialysés ou non, il est interdit de jeûner.
S’agissant des patients qui sont sous dialyse, là aussi, il est interdit de jeûner.
Il faut savoir que l’état général de ces malades est affaibli.
Ils présentent toujours des complications de type hypertension artérielle, de surcharge hydro sodée (rétention d’eau avec des œdèmes), hyperkaliémie (augmentation potassium dans le sang) qui peuvent entraîner des arrêts cardiaques. Dans de telles conditions, il est préférable pour le malade de s’abstenir de jeûner.
En tant que spécialiste des maladies rénales, quels sont les conseils que vous adressez aux patients et à nos lecteurs?
Il faut toujours voir l’évolution de la maladie, le degré de l’insuffisance rénale, tout en considérant si le patient est dialysé ou pas. Si on veut ménager ses reins il ne faut pas les mettre en restriction d’eau. Il faut boire régulièrement après le Ftour, au moins toutes les deux heures, un grand verre d’eau. Il ne faut pas abuser du sel et du sucre, car ils entrainent une déperdition importante d’eau. Ce qui met le rein en restriction d’eau .Il y a aussi le nombre et la quantité de protéines que l’on va consommer. Il faut éviter les excès.
Il faut éviter l’auto-médication, faire attention avec les médicaments comme le paracétamol et les anti-inflammatoires, surtout les personnes âgées.
Quand on se sent mal, ou lorsqu’on a une crise, il ne faut pas hésiter à rompre le jeûne dans la journée.
Si les douleurs persistent, il faut consulter le médecin qui est le seul à vous informer, a vous conseiller sur ce qui est le mieux pour vous.
Dans tous les cas de figure, le praticien cherchera toujours à faciliter à son malade la pratique du jeûne tout en procédant à un suivi rapproché pour éviter tout risque éventuel.